« Pour une Algérie Républicaine Moderne et Sociale »
   
  PARTI pour la LAICITE et la DEMOCRATIE (P-L-D) ex MDSL
  APPEL DE LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE!
 
APPEL DE LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE!

NON AU LYNCHAGE DES FEMMES.

   NON A « L’AMNISTIE NATIONALE » !
 
Nous sommes révoltées devant  la folie meurtrière des intégristes islamistes qui a fait une nouvelle fois rage dans le quartier « d’El Haicha » à Hassi-Messaoud, ville pétrolifère du Sud de l’Algérie. Nous n’avons pas oublié la nuit funèbre du 13 juillet 2001 au cours de laquelle  près  de cinquante femmes ont vécu le martyre dans ce même quartier. En effet, cette nuit là, plusieurs centaines d’individus déchaînés suite au  prêche d’un imam s’étaient armés de matraques, de couteaux et de sabres pour s’attaquer aux travailleuses et à leurs enfants.
Jusqu’où ira la barbarie ?Près de dix ans après l’expédition punitive de 2001 le scénario de l’horreur se reproduit encore !  A nouveau le sabre, le  couteau, la  hache et le bâton contre des femmes sans défense. Elles sont agressées, torturées, violées, assassinées. Depuis plusieurs semaines, le terrorisme fait de nouveau rage et les femmes, toujours et encore elles sont les boucs émissaires d’agresseurs qui tentent d’imposer leur ordre à  la société.
Malgré les dépôts de plainte au commissariat, la police s’est figée dans une inertie totale. Les plaintes sont classées sans suite. Aucune mesure n’est prise pour juguler le climat de violence. Dans cette zone sous haute protection, cela signifie-t-il qu’aux yeux des pouvoirs publics algériens la sécurité des bases pétrolières est  plus précieuse que  les  vies humaines !!
 
Evidemment, cette situation gravissime est le corollaire de toutes les dérives scandaleusement baptisées «rahma», «concorde civile», «réconciliation nationale» mais qui en fait, au nom de « l’amnistie nationale »   banalisent voire  légalisent  le crime, le viol, le kidnapping et menacent  l’avenir de l’Algérie sur l’autel du compromis avec l’islamisme politique.
Ces dispositifs  n’ont jamais assuré la protection des victimes de la terreur islamiste, elles n’ont pas rendu justice aux familles des victimes, ni aux victimes elles-mêmes et en particulier les  survivantes des massacres  de HASSI MESSAOUD. Au contraire, ce sont les victimes qui doivent se cacher, se taire, se résoudre à la fuite, au silence, quand ce n’est pas à l’exil.
 
Ces évènements tragiques mettent une nouvelle fois à l’ordre du jour la nécessité d’abroger le  Code de la famille qui ravale les femmes au statut de sous-citoyennes et cultive  dans les esprits un obscurantisme d’un autre âge.
L’Etat algérien a failli à sa première mission qui est d’assurer la sécurité de ses citoyens et citoyennes.
 
Tous les signataires de cet appel sont aux cotés des féministes algériennes pour appeler toutes les forces démocratiques  à manifester leur solidarité avec les femmes de Hassi-Messaoud et  exiger :
 
  • la cessation de la terreur qui règne contre les femmes à Hassi-Messaoud et la fin de toutes les exactions,
  • la mise en place d’une protection immédiate et exceptionnelle pour garantir la sécurité, l’intégrité physique de ces femmes et leur droit au travail,
  • la reconnaissance publique par les autorités locales et territoriales des actes de terrorisme dont elles sont victimes,
  • la mise en place de poursuites judiciaires contre tous ceux qui ont été confondus de         crimes à leur encontre,
  • la mise en œuvre d’une procédure de justice destinée à  mettre un terme à l’impunité   des actes de vandalisme et de terrorisme.  
 Premières organisations signataires :

Initiative Féministe Européenne IFE-EFI (Europe)-(France, Pays d’Aubagne, Italie, Pologne, Suède, Angleterre, Croatie….)
·         FEMMES SOLIDAIRES
·         UNION DES FAMILLES LAIQUES (UFAL)
·         Collectif Femmes du PARTI POUR LA LAICITE ET LA DEMOCRATIE -PLD- (Algérie)
·         Organisation for Women's Liberation-Iran
·         Secularism is a women’s issue (SIAWI)
·         Ligue du Droit International  des Femmes
·         Collectif citoyen pour l’égalité et la laïcité (CCIEL)
 
 
            Premières personnalités signataires :
Wassyla TAMZALI, écrivaine
Anne Marie LIZIN, sénatrice honoraire belge
Marieme HELIE- LUCAS, Coordinatrice du réseau SIAWI
André GOMAR, président association laïque de Saint-Denis
Hakim ARABDIOU, militant laïque algérien
Liliane KANDEL, essayiste, responsable du Centre d’études et de recherches féministes de l’université Paris VII
Djemila BENHABIB, auteure de « Ma vie à contre coran »
Caroline FOUREST, journaliste et écrivaine
Teresa JAKUBOWSKA,  Présidente du parti RACJA - Varsovie Pologne
 

 
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Samedi 17 avril 2010
Soad Baba-Aïssa, coordinatrice de l’initiative féministe européenne.
 
Comment réagissez-vous aux exactions subies par les femmes de Hassi Messaoud ?
Soad Baba-Aïssa. Nous sommes révoltées que des femmes puissent être lynchées sans que cela ne suscite de réaction de la part du gouvernement algérien. Malgré les dépôts de plaintes au commissariat, la police s’est figée dans une inertie totale. Les plaintes sont classées sans suite. Aucune mesure n’est prise pour juguler le climat de violence. Dans cette zone sous haute protection, cela signifie-t-il qu’aux yeux des pouvoirs publics, la sécurité des bases pétrolières est plus précieuse que les vies humaines ?
 
Comment expliquez-vous cette situation ?
Soad Baba-Aïssa. Elle est le corollaire de toutes les dérives scandaleusement baptisées «  concorde civile  » ou «  réconciliation nationale  », mais qui, en fait, au nom de « l’amnistie nationale  », banalisent le crime, le viol, le kidnapping, et menacent l’avenir de l’Algérie sur l’autel du compromis avec l’islamisme politique. Ces dispositifs n’ont pas rendu justice, en tout cas pas aux survivantes de Hassi Messaoud qui avaient échappé aux exactions de l’été 2001. Au contraire, ce sont elles qui doivent se cacher, se taire ou se résoudre à la fuite.
 
Que faire contre ces violences sexistes ?
Soad Baba-Aïssa. Ces événements mettent une nouvelle fois à l’ordre du jour la nécessité d’abroger le Code de la famille qui ravale les femmes au statut de sous-citoyennes et cultive l’obscurantisme. Notre association appelle à élargir la mobilisation pour soutenir ces victimes et exiger une protection immédiate afin d’assurer leur intégrité physique et leur droit au travail.
 
Entretien réalisé par Mina Kaci
L'Humanité, 17 avril 2010
 
Samedi 17 avril 2010
Le Code de la famille faisant des femmes des mineures à vie et l’idéologie intégriste expliquent en grande partie le sexisme. Comment est-il possible que des personnes soient torturées, violées, volées, humiliées dans l’indifférence et l’impunité? Neuf mois après le lynchage de dizaines de femmes à Hassi Messaoud, les agressions ont repris dans cette ville saharienne, à 800 kilomètres au sud-est d’Alger. En 2001, après un prêche virulent d’un imam, des hommes fanatisés se sont attaqués à des femmes vivant seules, célibataires ou divorcées, accusées d’être des «putes». Cette importante commune pétrolière d’Algérie attire des milliers de travailleurs du pays, notamment des femmes, qui viennent faire le ménage ou la cuisine dans les entreprises étrangères arrivées avec la libéralisation de la production des hydrocarbures.
Les associations féministes d’ici et de là-bas lient cette violence sexiste au Code de la famille qui fait des femmes des mineures à vie, officiellement placées sous le contrôle des hommes. De telles agressions sont également à mettre en relation avec l’idéologie intégriste. Elle s’est répandue dans la société algérienne, alors que le terrorisme, combattu par l’armée, a largement régressé. «Aujourd’hui, les haut-parleurs des mosquées peuvent vociférer les mêmes insultes et les mêmes menaces à l’encontre des femmes sans qu’aucun procès pour diffamation ou incitation à la haine n’ait jamais lieu», explique Nadia Kaci, l’auteure de Laissées pour mortes (1).
Ainsi, en juillet2001, l’imam d’El-Haïcha, toujours à Hassi Messaoud, avait chauffé à bloc des centaines de jeunes pour mener une «expédition punitive» envers les travailleuses, qu’il avait qualifiées de «fornicatrices porteuses du sida», ces mécréantes qui «excitaient» les hommes en se «pavanant nues», autrement dit, sans le hidjab. L’imam intégriste incitait donc les fidèles à donner une leçon à ces femmes qui «salissent la réputation» de la ville.
 
(1) Laissées pour mortes, Nadia Kaci, éditions Max Milo, 18euros.
 
M.K.
L'Humanité, 17 avril 2010
 
 
Samedi 17 avril 2010
En Algérie, plusieurs associations de femmes se réunissent demain pour décider d’un rassemblement, la semaine prochaine, devant le ministère de l’Intérieur afin de demander que les victimes des violences dans une ville comme Hassi Messaoud, dans le Sahara, soient protégées par les forces de l’ordre. Elles dénoncent «l’impunité dont bénéficient les agresseurs» et «l’absence de l’État et des institutions censés protéger les citoyennes et les citoyens». L’indignation des associations algériennes trouve un écho en France, parmi les féministes, notamment celles qui sont regroupées dans la Marche mondiale des femmes. Des appels circulent sur le Net pour interpeller la rapporteure de l’ONU spécialisée sur les questions de violences sexistes.
 
L'Humanité, 17 avril
 
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Jeudi 15 avril 2010
Des associations, ligues et défenseurs des droits humains se sont réunies mercredi 14 avril 2010, pour dire "Stop à la barbarie". Voici leur déclaration
 
Hassi-Messaoud
 
Halte à la "fatalité" de la terreur à l’encontre des femmes !
La Constitution algérienne consacre la sécurité des citoyennes et des citoyens. L’Algérie a ratifié la Convention sur l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, la Convention contre la torture et autres peines et traitements cruels ou dégradants, la Déclaration sur l’élimination des violences faites aux femmes.
 
Au nom de ces principes, nous sommes profondément choqués par la nouvelle tragédie vécue par des femmes, venues de différentes régions d’Algérie, travaillant et vivant dans des habitations précaires à Hassi-Messaoud, une des villes les plus sécurisées du pays.
 
Le martyre qu’elles viennent de subir est la répétition macabre des évènements de 2001. Un sinistre 13 juillet 2001, une horde de 300 hommes armés attaquent une centaine de femmes et leur font subir les pires atrocités – un véritable lynchage – dans le quartier d’el-Haicha à Hassi-Messaoud.
 
Nous tenons d’abord à exprimer à ces nouvelles victimes notre solidarité, notre indignation et notre émotion face aux actes barbares que des criminels déchaînés commettent sans répit en venant et revenant plusieurs nuits de suite, depuis quelques semaines, sur les lieux de leurs forfaits.
 
Juillet 2001 ... mars 2010
Même lieu.
Mêmes agressions.
Même type d’agresseurs lâches et cyniques provoquant des actes méticuleusement organisés, donc mûrement prémédités sinon commandités.
Même type de scénario d’horreur où les criminels regroupés et encagoulés terrorisent chacune des victimes parce que isolées et sans défense.
 
Même type de violences extrêmes où la rapine, les injures et la torture visent à humilier et à réduire à néant les femmes en tant que telles.
Même volonté par la valeur exemplaire de tels actes de terreur de dissuader toutes les femmes d’exercer librement leur droit au travail où que ce soit sur le territoire national et de les punir parce qu’elles vivent seules.
 
Au-delà du constat horrifié, de la condamnation des criminels et de la compassion pour les victimes, nous tenons aussi à souligner le caractère particulier de ces expéditions punitives qui rappellent étrangement non seulement les évènement de 2001 mais aussi toutes les autres agressions depuis vingt ans dans différentes régions d’Algérie ( Ouargla, Remchi, Bordj, Tebessa…). Elles rappellent étrangement, hélas, les viols collectifs des femmes par les terroristes, ce crime contre l’humanité, tâche noire qui a mis en péril notre avenir et celui de toute la société. Il s’agit donc d’une violence systématisée, construite, structurelle, orchestrée, autant d’éléments de gravité supplémentaire.
 
En effet, cette répétition et continuité d’actes odieux à l’encontre des femmes qui semblent se perpétuer comme une ‘fatalité’ n’est possible que parce qu’en 2001 le traitement de l’affaire de Hassi-Messaoud s’est réduit à une parodie de justice reléguant cette tragédie au rang de vulgaire fait divers.
 
Cette répétition et continuité d’actes intolérables n’est possible que par la complicité et le silence non seulement des institutions et des autorités locales mais aussi le laxisme de la société. D’ailleurs, l’absence de réaction citoyenne et de médiatisation de cet évènement est frappante et inquiétante.
 
Cette répétition et continuité de crimes contre l’humanité n’est possible que par l’impunité dont bénéficient les agresseurs contre les femmes.
Cette répétition et continuité de violation des droits de la personne humaine n’est rendue possible que par l’absence de l’Etat et des institutions censés protéger les citoyennes et les citoyens.
Est-ce que cela signifie qu’aucune femme ne peut se sentir en sécurité dans son propre pays et qu’aucun citoyen n’est protégé par la loi ?
 
C’est pourquoi, encore une foi, nous dénonçons avec force ces crimes et interpellons les pouvoirs publics pour qu’ils réagissent en urgence en assurant la protection de ces femmes victimes encore sous le coup de la menace quotidienne, et leur prise en charge globale (médicale psychologique, sociale et juridique). Nous sommes déterminés à soutenir toutes ces femmes victimes d’agressions inacceptables.
 
Signataires :
Réseau Wassila, ADPDF (Association pour la défense et protection des droits des femmes), AEF (Association pour l’émancipation des femmes), APF (Association du planning familial),
ANADDE, ATUSTEP, Amusnaw, AVIFE (Association d’Aide aux Victimes de Violence Femmes et Enfants), CIDDEF (Centre d’Information et de Documentation /Droits des Femmes et des Enfants), Collectif des Femmes du Printemps Noir, Djazairouna, FEC (Femmes en Communication), Collectif des Femmes du Parti Laïque et Démocratique (PLD), LADDH Ligue Algériennne de Défense des Droits des Hommes), LADH (Ligue Algérienne des Droits des Hommes), RACHDA, SOS Femmes en Détresse, Tharwa Fatma N’Sumer, Fatiha Mamora et Rahmouna (deux femmes victimes des attaques de 2001 à Hassi Messaoud).
 
 
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ELLE / Société / Le Désert de la Peur.  (Revue française).
Du 22 avril 2010
Des femmes de nouveau martyrisées en Algérie
 
Depuis plusieurs semaines, c’est chaque nuit ou presque le même scénario de terreur. Ils surgissent en bande, cagoulés, armés de haches, de couteaux, de sabres ou de bâtons. Des bandes de « jeunes voyous drogués, ou d’intégristes, ou tout cela à la fois », dit-on là-bas, qui tabassent, volent l’argent liquide, les bijoux, les appareils d’électroménager. Agressent sexuellement, parfois.
Leurs cibles ? Des femmes seules, mères divorcées, veuves ou célibataires, âgées de 18 à 50 ans, qui vivent dans les quartiers populaires loin du centre-ville, là où les loyers sont moins chers. Des « étrangères » venues de l’ouest de l’Algérie pour chercher du boulot dans le sud, à Hassi Messaoud, une ville tentaculaire où des dizaines de multinationales exploitent les juteuses ressources pétrolifères. Pour les cadres de ces compagnies, qui vivent à l’américaine dans les sites protégés de leur entreprise, Hassi Messaoud est un véritable eldorado économique.
Pour toutes celles, poussées par le chômage et la pauvreté, venues y trouver un emploi précaire de femme de ménage, de cuisinière ou de simple ouvrière, c’est l’enfer sur terre. Hassi Messaoud ou la ville qui n’aimait pas les femmes.
Des femmes de nouveau martyrisées en Algérie
le 22 avril 2010 |
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39 victimes avaient osé porter plainte
 
En juillet 2001 déjà, une expédition punitive avait été lancée après le prêche d’un imam qui dénonçait ces « mécréantes », ces « fornicatrices », ces « femelles dépravées » qui ne portent pas le hidjab, vivent sans homme et travaillent comme des hommes. Galvanisés par ces paroles, 300 à 500 hommes avaient ratissé le quartier d’El Haïcha, défoncé les portes des appartements, battu, violé, humilié les objets désignés de leur haine. Trente-neuf victimes avaient osé porter plainte. Trois seulement ont persévéré jusqu’au procès malgré les menaces et l’indifférence des pouvoirs publics. L’imam n’a pas été révoqué. Et le procès des auteurs de ces exactions n’a été, pour les associations de défense des droits des femmes algériennes, qu’une parodie de justice.
Légende : A Hassi Messaoud, les victimes osent rarement se réunir pour dénoncer leur sort
Des femmes de nouveau martyrisées en Algérie
le 22 avril 2010 |
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Des témoignages édifiants
 
« Cette insupportable impunité à la suite des événements de 2001 a permis que des actes odieux se produisent encore aujourd’hui, dénonce la comédienne et militante féministe algérienne Nadia Kaci, qui a recueilli les témoignages édifiants de deux victimes de l’expédition punitive de 2001, Fatiha Maamoura et Rahmouna Salah, dans “Laissées pour mortes”. On retrouve dans les agressions de ces dernières semaines la même haine de ces femmes qui, parce qu’elles vivent seules ou entre elles, ne peuvent être que des prostituées. » Pour Nadia Kaci, cette violence prend racine dans la période noire du terrorisme islamiste des années 90 mais aussi dans le Code de la famille fondé sur la charia qui, même s’il a été amendé en 2005, « continue de maintenir les femmes dans le statut de mineures à vie et légitimise toutes les injustices qui leur sont faites ».
Légende : En janvier 2005, seules Fatiha, Rahmouna et Nadia ont porté plainte au tribunal de Biskra.
Des femmes de nouveau martyrisées en Algérie
le 22 avril 2010 |
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Combien d'autres crimes passés sous silence ?
 
« Les Algériennes continuent de payer le prix fort, dit-elle. Pendant la guerre civile, des centaines d’entre elles ont été enlevées par des milices islamistes, violées, tuées, éventrées enceintes. D’autres ont vu leur mari se faire assassiner. Les auteurs de ces crimes n’ont jamais été poursuivis au nom de la paix civile. Cette impunité systématique que constitue un message très fort sur fond de résurgence du discours intégriste et de dénigrement systématique de la femme qui autorise, de fait, le passage à l’acte de ceux qui s’attaquent aux femmes à Hassi Messaoud et partout ailleurs dans le pays. »
Selon des chiffres officiels algériens, plus de 4 500 plaintes pour « violences et harcèlement contre des femmes » ont été enregistrées en à peine six mois en 2009. Pour combien d’autres crimes passés sous silence ? Un « silence complice de la police comme de la société tout entière », pour Louisa Aït Hamou, du réseau Wassila, antenne d’écoute, d’aide juridique et d’accompagnement des femmes et des enfants. « Il y a tellement d’autres cas qui ne sont pas médiatisés, déplore-t-elle. Les victimes des exactions de ces dernières semaines resteront terrorisées tant que le gouvernement n’apportera pas de réponse concrète à ce déchaînement de violence. »
 

Des femmes de nouveau martyrisées en Algérie
le 22 avril 2010 |
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Appels affolés de femmes qui ont été agressées
 
Chaque jour, Salima Tlemçani, journaliste au quotidien « El Watan », qui a révélé dans un remarquable reportage l’ampleur des actes de terreur commis à Hassi Messaoud, reçoit des appels affolés de femmes qui ont été agressées. « Le climat qui y règne est terrible, explique-t-elle. Rares sont celles qui portent plainte par peur des représailles, par honte ou parce qu’elles sont découragées par l’immobilisme de la police jusque-là. Certaines ont pu déménager au centre-ville, plus sûr, mais où les loyers sont très chers, et presque tout leur salaire va y passer… Ces femmes sont agressées parce qu’elles dérangent l’ordre établi dans une société d’hommes, faite par et pour les hommes. »
Des femmes de nouveau martyrisées en Algérie
 
Des patrouilles de police mais jusqu'à quand ?
 
Depuis la publication de l’article de Salima Tlemçani, des patrouilles de police sont enfin organisées. Mais jusqu’à quand, s’inquiètent plusieurs associations de femmes*, déterminées à ce que le silence ne prenne, une fois de plus, le pas sur la justice. « En dix ans, la violence contre les femmes à Hassi Messaoud n’a jamais vraiment cessé mais elle n’était pas médiatisée, estime Nadia Kaci. Elle s’est banalisée, installée, et a permis que des bandes d’hommes continuent en toute impunité de s’attaquer aux femmes seules. » Nadia Kaci en est convaincue : « Plus on parlera de ces femmes, plus on les protégera. C’est le silence qui va les tuer. »
Des femmes de nouveau martyrisées en Algérie
le 22 avril 2010 |
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Les mots de l'enfer
 
Fatiha Maamoura, 35 ans, et Rahmouna Salah, 44 ans, portent encore dans leur chair les sévices qu’elles ont subis lors de l’expédition punitive de 2001 à Hassi Messaoud. Ces deux mères de famille ont osé aller avec courage devant la justice. Dans « Laissées pour mortes : le lynchage des femmes de Hassi Messaoud » (Max Milo Edition), Nadia Kaci a retracé l’itinéraire de ces rescapées de l’horreur, leur quotidien à Hassi Messaoud et le contexte particulièrement hostile qui règne à l’encontre des femmes seules dans ce poumon économique de l’Algérie. Fatiha et Rahmouna, au nom des nouvelles victimes de la terreur à Hassi Messaoud, continuent de lutter contre l’inertie des pouvoirs publics et de révéler au grand jour ces violences toujours taboues dans la société algérienne. A lire absolument.
Légende : Fatiha Maamoura et Rahmouna Salah.


 
Posté par dsinterim le avril 17, 2010
Déjà victimes de ce qui fut un véritable pogrom misogyne le 13 juillet 2001, les femmes de Hassi Messaoud (Algérie) sont à nouveau touchées par une vague de violences sexistes.
 
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Appel de la marche mondiale des femmes – France,15 avril 2010 :
Suite à la connaissance que nous avons eu de nouvelles violences faites aux femmes travaillant à Hassi-Messaoud en Algérie, nous vous retransmettons ce mail à envoyer de toute urgence.
Par ailleurs, nous avons fait savoir aux associations qui ont retransmis l’information que nous aimerions faire plus, et proposé un rassemblement à l’ambassade d’Algérie, et, si possible, devant tous les consulats en France.
Une réunion des associations de femmes en Algérie étant prévu ce dimanche, nous attendons de leurs nouvelles afin, si possible, de se mobiliser le même jour qu’elles, partout où cela sera possible, avec toutes les associations qui le voudront.
Lettre à envoyer par courrier ou par mail à :
Madame Rashida Manjoo, Rapporteure spéciale sur les violences faites aux femmes , OHCHR-UNO, 8-14 Avenue de la Paix, 1211 Geneva 10, Switzerland , mail : vaw@ohchr.org
Madame,
Je tiens à vous alerter des faits extrêmement graves qui ont lieu actuellement dans la ville de Hassi-Messaoud, base pétrolière du sud algérien.
Depuis plus de 2 mois, des femmes, venues des 4 coins du pays afin de subvenir au besoins de leurs familles travaillant dans les bases pétrolifères, se font agresser régulièrement la nuit. Elle sont violées, torturées, brulées vives. Leurs maisons sont saccagées et pillées par des hommes armés de gourdins, de haches, de couteaux, leurs têtes encagoulées ou même, à visages découverts. La plupart du temps, les femmes ont beau hurler, aucun voisin ne leur vient en aide. Lorsqu’elles se rendent au commissariat, elles doivent supplier pour que leurs plaintes soient enregistrées par des policiers méprisants. Ces crimes ne sont jamais poursuivis en justice.
Nous savons aussi que des meurtres ont eu lieu. Il y a une dizaine de jours une femme a été brûlée vive et se trouve actuellement dans le coma à l’hôpital de Ouargla.
Dans la nuit du dimanche 12 avril, les agressions ont redoublé. Les femmes que nous avons eu au téléphone parlent d’un imam qui aurait incité les hommes à passer à l’acte.
Ces crimes sont la conséquence directe de la tragédie du 13 juillet 2001 dont il est important de rappeler les faits : plus d’une centaine de femmes furent violées, torturées et enterrées vivantes par 400 à 500 hommes. Sur cette foule ayant commis ce pogrom, seuls vingt-neuf hommes ont été accusés. De ce nombre, 3 hommes seulement ont réellement purgé des peines. Les autres ont été condamnés par contumace ou encore, innocentés !
Aujourd’hui, dans cette atmosphère où l’impunité fait loi, les femmes sauvagement agressées ne savent plus vers qui se tourner. Devant la non assistance des pouvoirs publics, nous vous prions d’intervenir de toute urgence auprès du gouvernement algérien afin qu’il assure la sécurité et l’assistance légitimes de toutes ces citoyennes algériennes.
Veuillez agréer, Madame la Rapporteure spéciale, l’expression de nos sentiments les meilleurs.
Signature
Plus d’informations sur la terreur misogyne à Hassi Messaoud .

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Article d’Afrik.com, 15 avril 2010 :

 
Le cauchemar des femmes d’Hassi Messaoud recommence
Cette ville du sud du pays avait déjà été le théâtre d’expéditions punitives en juillet 2001.
Depuis quelques semaines, les lynchages de femmes ont repris dans la ville d’Hassi Messaoud. Il y a neuf ans, elles avaient été des dizaines à être les victimes d’exactions, orchestrées par des bandes de jeunes hommes.
« Tu bouges tu meurs, sale p… », menace un homme armé d’un sabre accompagné de sa bande. Ils sont venus mettre à sac l’appartement de Fatiha, une femme vivant seule, dans le quartier des 36 logements. La scène se passe dans la nuit de mercredi à jeudi dernier à Hassi Messaoud. Cette ville pétrolière du Sud de l’Algérie, tristement célèbre pour des lynchages de femmes en juillet 2001, est de nouveau le théâtre d’expéditions punitives depuis quelques semaines, visant les femmes seules, nombreuses dans la région.
Suivies, attaquées, torturées, parfois violées et dépouillées de leurs biens, des dizaines de femmes d’Hassi Messaoud, ont à nouveau subi des violences ces dernières semaines, selon une enquête d’El Watan. Le mode opératoire est toujours le même : une bande de jeunes hommes, après avoir suivi sa cible, pénètre par effraction la nuit chez elle, et l’attaque. Encore sous le choc de son agression la semaine dernière, Souad raconte à El Watan : « Lorsque je me suis réveillée, j’ai vu le viseur d’un téléphone portable se fixer sur mon visage. J’étais terrorisée. Ma sœur criait et ma mère suppliait les assaillants de ne pas nous toucher. L’un d’eux m’a bloquée contre le mur en m’enfonçant un tournevis dans le ventre. Il m’a enlevé ma chaîne en or, mes bagues et mes boucles d’oreilles. […]. Il m’a interdit de crier et j’étais comme paralysée, jusqu’au moment où il a commencé à relever ma jupe. Je le suppliais, mais il était comme drogué. Il puait l’alcool, tout comme ceux qui étaient avec lui. […] Nous avons crié de toutes nos forces et l’un d’eux, dans sa fuite, a laissé tomber la serviette qui recouvrait son visage. Un visage que je garderais en mémoire toute ma vie. Les cinq ont pris la fuite lorsque les voisins ont ouvert leurs portes en entendant nos cris ».
Et la police ? Un silence presque complice entoure ces affaires. Et presque à chaque fois, les crimes restent impunis. Souad se souvient du jour où elle a prévenu les forces de l’ordre. « J’ai été au commissariat du quartier [...] Vous savez quelle a été la réponse de l’officier ? « Savez-vous qui sont ces jeunes ? Qui vous dit que moi, le policier, je ne suis pas avec eux ? Le matin, je mets ma tenue pour aller travailler et le soir je mets un turban autour de mon visage et j’agresse les femmes qui résident seules », a-t-elle confié à El Watan.
La crise de l’emploi : une des raisons de la frustration masculine
Mais pourquoi de tels lynchages ? La principale cause selon le journal Libération, serait, semble-t-il, d’ordre économique. Les femmes d’autres régions algériennes choisissent d’émigrer dans la commune connue pour ses opportunités d’emploi, notamment dans les domaines administratifs ou les compagnies étrangères, très implantées, recrutent. Ce nombre important de femmes sur le marché de l’emploi entraînerait une frustration des hommes au chômage.
Mais ce n’est pas la seule raison. Dans un pays où l’égalité entre les sexes a encore du chemin à faire (le code de la famille, en place depuis 1984 dans le pays, ne reconnait pas l’égalité entre hommes et femmes), une algérienne vivant seule est souvent mal perçue et considérée comme « perdue ». Certains vont jusqu’à dire qu’il faut la « châtier ». Les expéditions punitives d’Hassi Messaoud en sont une illustration à l’extrême.
Laissées pour mortes, un ouvrage paru aux éditions Max Milo le 11 février, relate, par le biais de la comédienne Nadia Kaci, les témoignages de Rahmouna Salah et Fatiha Maamoura, toutes deux victimes des lynchages en 2001. Elles ont vécu le calvaire durant la nuit du 31 juillet où des hommes encagoulés, armés de gourdins, ont attaqué, violé et parfois même enterré vivantes des femmes du quartier d’Al Haïcha.
La cité pétrolière est pourtant réputée être l’une des plus surveillées de la région. Mais à l’été 2001, des hommes, sous le commandement d’un imam, s’étaient mis en tête qu’ils devaient « châtier les femmes perdues ». Leur joug s’était abattu sur une quarantaine de victimes. Mais seules deux d’entre elles, Rahmouna Salah et Fatiha Maamoura, avaient osé porter plainte et aller jusqu’au bout de la procédure judiciaire. Plusieurs condamnations avaient été prononcées… par contumace. Selon Nadia Kaci, interviewée par L’Express, le gouvernement a « tout fait pour maintenir les yeux fermés. D’ailleurs, les violences faites aux femmes ont explosé depuis 2001. Mais tout est fait pour les décourager de porter plainte. J’en suis à me dire qu’il existe une réelle volonté politique de nuire aux femmes.

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Article de Salima Tlemçani, El Watan, 11 avril 2010 :
 
Elles sont attaquées de nuit par des jeunes encagoulés : Chasse aux femmes vivant seules à Hassi Messaoud
Parce que justice n’a pas été rendue aux victimes des violences d’El Haïcha, à Hassi Messaoud, en juillet 2001, des dizaines d’autres femmes vivent, non loin des mêmes lieux, un véritable cauchemar. Depuis quelques semaines, chaque soir elles subissent le pire. Constitués en bandes organisées, des jeunes hommes encagoulés munis de sabres, couteaux haches et bâtons fracassent les portes et investissent leurs maisons. Ni les cris, ni les pleurs des enfants, ni les supplications des vieux ne font reculer les assaillants dans leur sale besogne. Battues, menacées de mort, les victimes sont délestées de leurs bijoux, argent, téléphones portables et de tout objet ou équipement électroménager de valeur.
Hassi Messaoud (Ouargla). De notre envoyée spéciale
Depuis deux semaines, chaque soir, le scénario de l’horreur se répète, face à l’impuissance ou l’inertie des services de police, alors qu’un commissariat se trouve à quelques centaines de mètres de ce quartier situé dans la ville pétrolière censée être la plus surveillée du pays. Les maisons ne sont pas choisies au hasard. Elles sont repérées dans la journée, puis mises à sac la nuit. La plupart sont habitées par des femmes originaires du nord, qui vivent loin de leurs familles. Rares sont celles qui déposent plainte, car les plus téméraires ont payé cher leur acte. Elles ont fini par abandonner leur domicile, errant d’un quartier à un autre à la recherche d’un lieu plus sûr. Rencontrées sur place, les témoignages de certaines d’entre elles font froid dans le dos et font craindre le pire. Terrorisées, les victimes ont toutes refusé de révéler leur identité. « C’est la misère qui nous a fait faire des centaines de kilomètres à la recherche d’un emploi pour nourrir nos familles.
Nous ne voulons pas perdre le pain de nos enfants. Nous voulons juste gagner notre vie avec dignité et dans la sécurité. Nous sommes des citoyennes au même titre que les autres,et nous avons droit d’aller n’importe où pour travailler », déclare Souad, âgée d’une trentaine d’années. Lorsque nous lui avons rendu visite, dans sa maison du quartier des 36 logements, elle a mis du temps à nous ouvrir la porte. Elle venait de rentrer chez elle après avoir fait le tour des maisons de ses copines, sur le boulevard, au cœur même de la ville. Notre identité déclinée, elle exprime son « grand soulagement ». Cela fait plus d’une semaine que sa sœur et elle vivent un « vrai cauchemar ». Une bande de cinq à six jeunes enturbannés ont fait irruption chez elles au milieu de la nuit de mercredi à jeudi. « On nous avait déjà parlé de femmes ayant été agressées dans leur maison, mais je n’y ai pas cru. Je n’aurais pas pensé qu’un jour je serais une des victimes », raconte Souad, l’aînée d’une famille de trois filles et un garçon. Cela fait dix ans qu’elle travaille à Hassi Messaoud. Sa sœur cadette, avec laquelle elle partage le logement en parpaing constitué d’une pièce-cuisine, semble très fatiguée. Elle vient de subir une opération chirurgicale. En cette nuit de jeudi, les deux filles, leur jeune frère et leur mère venus leur rendre visite de très loin, ignoraient que le pire les attendait. Tous dormaient profondément lorsqu’ils ont brusquement été réveillés par de violents coups donnés à la porte d’entrée métallique. Avant même que Souad ait le temps de se mettre debout, déjà trois hommes encagoulés, surgissaient dans la pièce. « Lorsque je me suis réveillée, j’ai vu le viseur d’un téléphone portable se fixer sur mon visage. J’étais terrorisée. Ma sœur criait et ma mère suppliait les assaillants de ne pas nous toucher. L’un d’eux m’a bloquée contre le mur en m’enfonçant un tournevis dans le ventre. Il m’a enlevé ma chaîne en or, mes bagues et mes boucles d’oreilles. Ils avaient tous un accent du sud-ouest. Il m’a interdit de crier et j’étais comme paralysée, jusqu’au moment où il a commencé à relever ma jupe. Je le suppliais, mais il était comme drogué. Il puait l’alcool, tout comme ceux qui étaient avec lui. Ma sœur malade n’arrivait pas à se lever, ils lui ont demandé son téléphone portable, alors que ma mère a été délestée de sa bague en or avec violence. Son agresseur l’a obligée à l’enlever en maintenant le couteau collé à sa main, laissant une bonne entaille. Nous avons crié de toutes nos forces et l’un d’eux, dans sa fuite, a laissé tomber la serviette qui recouvrait son visage. Un visage que je garderais en mémoire toute ma vie. Les cinq ont pris la fuite lorsque les voisins ont ouvert leurs portes en entendant nos cris », témoigne Souad. Elle dénude son abdomen pour nous montrer la cicatrice, longue de quelques centimètres, laissée par le tournevis.
Elle raconte que les voisins disent tous n’avoir reconnu aucun des agresseurs, mais elle sait, au fond d’elle-même, qu’ils ne peuvent être étrangers au quartier. Toute la famille a couru vers le commissariat, mais ses portes étaient fermées. « Nous avons frappé à la porte et un policier nous a orientés vers la sûreté de daïra.J’ai commencé à hurler. Là, il m’a ouvert la porte et m’a fait entrer pour m’entendre et faire un procès-verbal. Une photo de ma blessure a été également prise, mais ce n’est que le lendemain que les policiers sont venus à la maison pour constater le vol. Lorsque je lui ai dit qu’ils nous ont volé tous nos biens, l’équivalent de plus de 100 000 DA entre bijoux et téléphones portables », l’officier m’a déclaré : « Estimez-vous heureuse. La femme qu’ils ont volée il y a quelques jours est à l’hôpital. Ils l’ont violée à cinq, la laissant dans un état de choc ». « Il nous a fait comprendre qu’il ne pouvait rien faire », révèle la sœur de Souad. Les policiers lui demandent de ne pas suspendre sa ligne téléphonique dans l’espoir de localiser les voleurs et de les arrêter. Mais ces derniers, encouragés par l’’impunité qui règne dans cette ville, utilisent sa puce pour appeler d’autres victimes. Durant des jours, ils les menacent de mort et profèrent des obscénités à leurs contacts dont les numéros ont été récupérés de la mémoire de la puce.
« Ici, les policiers ne protègent pas les femmes »
Souad ne peut plus supporter la situation. Au bout de cinq jours, elle décide de suspendre sa ligne et de quitter, elle et sa famille, la maison. Sa mère est repartie terrorisée chez elle, alors que les deux femmes se sont installées chez une amie, jusqu’à il y a deux jours. Elles nous montrent un couteau de boucherie qu’elles ont acheté pour se défendre. « Ici, la police est absente et nos plaintes sont toujours restées sans suite », dit-elle. Selon elle, le lendemain de l’attaque, au commissariat « de nombreuses femmes sont venues se plaindre. Elles ont toutes subi le même sort que nous. Elles ont été volées, tabassées et humiliées par le même groupe de voyous. Plusieurs d’entre elles étaient blessées. Et c’est là que j’ai entendu parler de cette fille de Saïda retrouvée assassinée il y a quelques mois. Une autre avait été retrouvée tuée, dans sa maison, il y a trois ans. Mais les auteurs de ces crimes n’ont jamais été arrêtés.
Le nombre de plaintes de femmes agressées sont les plus importantes au niveau des commissariats, et ce sont les policiers qui nous ont confirmé cette vérité », dit-elle. Parmi elles Hadda, la trentaine passée. Elle aussi a résidé dans le quartier des 36logements. Elle aussi est devenue une sans domicile fixe depuis cette nuit terrifiante de jeudi à vendredi. C’était presqu’au lever du jour. Elle dormait, avec sa fille et son petit garçon, lorsqu’elle a été réveillée par le bruit assourdissant de coups de pieds donnés à la porte d’entrée. C’était la troisième tentative d’attaque. La nuit d’avant, ce sont les cadenas de la première porte qui ont été cassés, mais les agresseurs se sont enfuis en entendant les voisins sortir dans la rue. Hadda a renforcé les serrures et décidé d’aller passer la nuit ailleurs. Fort heureusement pour elle, puisque les assaillants reviennent à la charge en son absence. Ils escaladent le mur et pénètrent dans la cour de la maison. Ils cassent les cadenas de la deuxième porte et mettent la maison à sac. Ils prennent tout ce qui a de valeur. Hadda revient dans la journée du jeudi, remet d’autres serrures et décide de ne pas laisser sa maison vide, pensant que les auteurs avaient pris ce qu’ils cherchaient. Pour son malheur, cette nuit-là, ils sont encore plus nombreux. Elle est leur cinquième victime dans le quartier. La voisine de Hadda a vécu les pires moments. Après avoir arraché la porte, les voyous ont investi les lieux qu’ils ont laissés en ruines. La voisine, terriblement affectée, brûlée à la main et à la jambe, a fini par abandonner son gîte. Le lendemain matin, lorsque Hadda est revenue, elle a trouvé la maison vide, les affaires personnelles de son amie jonchant le sol. Elle a fermée les portes et décidé de s’enfermer chez elle.
A la nuit tombée, les criminels reviennent sur les lieux. « Après plusieurs coups, la porte a cédé. Ils puaient l’alcool et certains n’arrivaient même pas à parler. L’un d’eux, armé d’un couteau, m’a braquée contre le mur et a exigé que je lui donne ma chaîne en or. Un deuxième est arrivé. J’étais comme paralysée. Ils me tiraient par les bras pour me faire sortir dehors. Je me suis agrippée au mur en les suppliant de m’épargner. J’étais prête à leur donner tout ce que j’avais comme économies et bijoux, pourvu qu’ils ne me salissent pas. Ce n’étaient pas des voleurs mais des terroristes. » « J’ai été au commissariat du quartier et là j’ai trouvé de nombreuses femmes venues, elles aussi, se plaindre d’agressions. Certaines, blessées, étaient dans un état lamentable. Les policiers ne faisaient que prendre nos témoignages. Je leur ai demandé pourquoi ils n’arrêtaient pas les auteurs. Vous savez quelle a été la réponse de l’officier ? ’’Savez-vous qui sont ces jeunes ? Qui vous dit que moi, le policier, je ne suis pas avec eux ? Le matin, je mets ma tenue pour aller travailler et le soir je mets un turban autour de mon visage et j’agresse les femmes qui résident seules’’. Ces phrases m’ont choquée. J’ai compris que je n’avais rien à faire au commissariat. Je suis sortie et j’ai appelé mon cousin. Il est venu le lendemain. Il est avec moi, en attendant que je trouve une autre location ailleurs. » « Je travaille pour faire vivre mes enfants. Si j’avais trouvé un emploi dans ma wilaya, je ne me serais jamais exilée. Pensez-vous que c’est facile de vivre loin de sa famille ? Pourquoi une femme qui travaille dérange-t-elle ? A Hassi Messaoud, les policiers ne protègent pas les femmes. Leurs préoccupations sont ailleurs ».
Des interrogations qui reviennent dans la bouche des nombreuses autres victimes rencontrées, comme Fatma, par exemple, dont le visage laisse transparaître une fatigue intense due à des nuits sans sommeil. Cette jeune femme de 27ans, orpheline de père, travaille pour nourrir ses sept frères et sœurs dont elle est l’aînée. « Je suis native d’un village réduit en cendres durant le terrorisme.Etant l’aînée, je n’ai jamais été à l’école. La mort de mon père a été un désastre pour la famille, parce qu’aucun d’entre nous n’avait un niveau ou une qualification pour décrocher un emploi. Ma mère est femme de ménage à la commune, et moi je fais la même chose ici, à Hassi Messaoud.Sauf qu’ici, les sociétés étrangères paient mieux leurs employés. Avec deux salaires, nous arrivons à assurer la scolarité de mes deux frères et deux sœurs et à avoir une vie plus ou moins décente. Cela fait cinq ans que je suis à Hassi Messaoud. Je partage mes deux pièces avec une autre femme, mère de famille. Jamais je n’aurais pensé qu’un jour je vivrais un tel cauchemar », lance-t-elle d’une voix entrecoupée de pleurs. En cette nuit de jeudi, elle dormait profondément.
Elle avait entendu parler des attaques nocturnes contre les femmes qui résident seules, mais elle pensait qu’elle ne serait jamais parmi les victimes, parce qu’elle était appréciée et respectée au quartier des 40logements. « Pour moi, c’était le choc. Au deuxième coup de pied, la porte d’entrée a cédé. Ils étaient cinq ou six, encagoulés et armés de couteaux, de sabres, de haches de boucherie et de barres métalliques. J’étais comme tétanisée. Les cris de ma colocataire ne les ont même pas dérangés. Ils étaient comme sous l’effet de la drogue. Ils m’ont délestée d’une bague que je portais et qui n’était même pas en or, puis de mon téléphone portable et de quelques objets, comme la cafetière électrique, le démo, une petite chaîne hifi, etc. J’avais très mal au bras parce que l’un deux me l’avait mis derrière le dos, en pointant ce dernier avec un couteau. J’ai essayé de me débattre, un autre, armé d’un sabre, m’a lancé : ’’Tu bouge tu meurs, sale p…’’ J’ai maudit le jour où je suis venue au monde. Je ne suis pas une prostituée. Je suis une femme sans ressources qui aide sa famille à vivre dans la dignité. Mon père m’a donné une éducation qui m’a permis de ne jamais quémander le pain, mais d’aller le gagner à la sueur de mon front », raconte Fatma, avant d’être interrompue par les sanglots. Fatma dévoile son dos pour montrer une entaille de quelques centimètres, puis son bras et son sein marqués d’ecchymoses. « Qu’ai-je fais pour mériter cette torture ? La police ne nous protège pas. Lorsque j’ai été me plaindre au commissariat, au début, les policiers ne voulaient même pas prendre ma déposition. J’ai commencé à crier et c’est là que l’un d’eux a fini par me lancer une phrase assassine : ’’Que voulez-vous que l’on fasse ? Vous n’avez qu’à aller ailleurs ! Retournez chez vous par exemple, vous serez plus en sécurité. Ici, c’est dangereux pour des femmes comme vous !’’ Est-ce des propos à tenir à des victimes de violences qui viennent se plaindre ? N’avons-nous pas droit à la sécurité comme tous les autres citoyens ? Regardez ce que j’ai acheté aujourd’hui : une bombe lacrymogène pour me défendre. J’ai déjà un couteau et si je trouve une arme, je suis prête à l’acheter pour défendre mon honneur et ma dignité. A Hassi Messaoud, l’Etat ne me protège pas », crie Fatma.
« Rentrez chez vous, ici c’est dangereux pour les femmes »
La sensation d’avoir été humiliée à deux reprises, d’abord par ses agresseurs puis par les policiers, la tétanise. Elle ne dort plus, change souvent son itinéraire pour aller au travail parce qu’elle sent qu’elle est suivie partout. Elle a pu voir le visage d’un des agresseurs et elle se sent en danger. Ses amies sont à ses côtés. Elles viennent lui proposer de déménager vers un F2 trouvé au centre-ville, dont le loyer, 25000 DA, sera partagé à cinq. Fatma, les larmes aux yeux, a du mal à accepter d’abandonner une maison dont le propriétaire a déjà pris six mois d’avance à compter de 5000DA, elle dont le salaire est compté au dinar près pour financer les dépenses de la scolarisation de ses frères et sœurs. Durant deux nuits de suite, les deux quartiers ciblés par les attaques ont renoué avec le calme. Nos va-et-vient entre les ruelles non éclairées ont suscité la suspicion chez les groupes de jeunes adossés aux murs à chaque coin de rue. Ce sont peut-être des agresseurs qui attendent le moment propice. Notre présence, en véhicule banalisé, les a peut être freinés. La rumeur sur notre passage a déjà fait le tour. Saïda, Nadia, Salima, Amriya, Soumeya et de nombreuses autres femmes nous demandent de partir de peur de subir des représailles.
Elles en sont à leur deuxième tragédie après celle vécue à El Haïcha, qui porte bien son nom. El Haïcha, « la bête », est situé à quelques encablures des cités des 36 et 40 logements où, en juillet 2001, plusieurs dizaines de femmes ont été torturées, lapidées, violées, enterrées vivantes par une horde de jeunes chauffés à blanc par l’imam, en plein milieu de la nuit. Blessées physiquement et touchées dans leur dignité, les victimes n’ont, à ce jour, pas obtenu leur droit à la justice. De nombreux agresseurs vivent tranquillement chez eux, protégés par les leurs, souvent des notables aux traditions très conservatrices qui n’acceptent pas que des femmes habitent seules au milieu des leurs ou qu’elles « arrachent le travail des hommes ». Les assauts répétés contre leurs maisons sont pour eux « une expédition d’épuration » que même les services de sécurité ne peuvent empêcher. Une réalité qui se confirme sur le terrain. Depuis près d’un mois, les femmes des quartiers des 36 et 40Logements vivent l’enfer. L’inertie des services de police fait craindre le pire en ces lieux livrés à des bandes organisées de délinquants aux visages masqués. A ce rythme, si les pouvoirs publics n’interviennent pas, un autre drame beaucoup plus grave que celui d’El Haïcha pourrait avoir lieu. Et là, l’entière responsabilité incombera aux autorités dont la mission principale est d’assurer la sécurité des biens et des personnes, des citoyens et citoyennes algériens, et non pas uniquement celle des étrangers, très nombreux dans cette région du pays.

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Communiqué d’AFEMCI, Association des Femmes Euro- Méditerranéennes Contre les Intégrismes, 13 avril 2010 :
Les femmes de Hassi Messaoud pourchassé, violées, torturées, tuées une deuxième fois par des hommes encagoulés.
Les femmes euro-méditerranéennes contre les intégrismes sont horrifiées par ce qui se passe aujourd’hui à Hassi Messaoud (Sud de l’Algérie). Des femmes travailleuses sont victimes une deuxième fois par des hommes encagoulés.
La première attaque remonte à 2001 où des hommes manipulés par leur imam, violent, torturent, tuent, lapident des femmes vivant seules ou avec leur enfants. Pour fuir la misère, elles ont été obligées dans leur majorité, de quitter leurs villes pour travailler dans le sud et bénéficier ainsi d’un toit pour sauvegarder leur dignité. Face à l’impuissance et la passivité des forces de l’ordre, elles vivent encore une fois un véritable cauchemar.
C’est une violation des droits de L’homme. Afemci dénonce et condamne ces actes de barbarie. Il faut que justice soit rendue à ces victimes.
Afemci appelle les Algériens et Algériennes de France à une mobilisation générale pour dénoncer et condamner ces actes criminels.
AFEMCI réclame :
• Arrêt, jugement et condamnation de ces criminels et de leurs actes
• Urgence d’une protection policière immédiate pour ces femmes
• Justice et réparation pour ces femmes victimes de la barbarie
• Reconnaissance de leur statut de victimes
• Accompagnement psychologique
• Bouclier humain international pour les soutenir.

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Interview de Nadia Kaci, L’Express, 14 avril 2010
“Une volonté politique de nuire aux femmes algériennes”
Depuis plus de deux mois, la ville algérienne d’Hassi Messaoud est le théâtre d’expéditions punitives ultra violentes, menées par des groupes d’hommes contre des femmes. Une situation que la ville avait déjà connue en 2001. La comédienne algérienne Nadia Kaci avait prêté sa plume à deux victimes pour témoigner. Aujourd’hui, elle nous explique le retour du phénomène.
Depuis quand les violences ont-elles repris, et sous quelle forme ?
Ça a recommencé il y a un peu plus de deux mois et demi. Pratiquement toutes les nuits, des groupes d’hommes défoncent les portes, entrent et agressent les femmes à l’arme blanche. Ils les violent, les torturent et pillent leur maigre bien. C’est très comparable aux évènements de 2001, sauf qu’à l’époque, plus d’une centaine de femmes avait été agressée en trois nuits. Là, les violences sont les mêmes mais s’étendent dans la durée.
En 2001, un imam radical semblait, par ses prêches, être l’instigateur de ces expéditions. Est-il toujours en poste à Hassi Messaoud ?
Les femmes qui ont témoigné récemment m’ont raconté qu’un imam avait chauffé à blanc les hommes dimanche ( 11 avril, ndlr) soir. Mais elles n’ont pas su me dire son nom.
Comment réagissent les autorités locales à cette nouvelle vague d’agression ?
Dernièrement, la voisine d’une victime a appelé la police à deux reprises pendant une attaque. La première fois, ils lui ont dit d’aller se recoucher. La seconde, ils lui ont raccroché au nez. Après, ça ne répondait plus. On a vraiment l’impression de vivre dans une zone de non-droit. Certains disent que les policiers eux-mêmes ont peur des représailles s’ils interviennent. D’autant plus qu’il n’y a pas de suites judiciaires lorsque les suspects sont arrêtés.
Depuis 2001, le gouvernement n’a donc pas ouvert les yeux sur ce phénomène ?
Bien au contraire, il a tout fait pour les maintenir bien fermés. D’ailleurs, les violences faites aux femmes ont explosé depuis 2001. Mais tout est fait pour les décourager de porter plainte. J’en suis à me dire qu’il existe une réelle volonté politique de nuire aux femmes.
Pourquoi ?
Selon moi, il y a deux facteurs. D’abord, le code de la famille de 1984, dans lequel on a expliqué aux hommes qu’ils avaient tous les droits sur leurs femmes. Ensuite, l’impunité réservée aux intégristes qui ont torturé et violé pendant les années noires du terrorisme. Aujourd’hui, on les appelle même des “repentis”, alors qu’ils ne sont jamais repentis de rien! Ça revient à expliquer aux hommes qu’ils peuvent se défouler sur leurs femmes en toute impunité. C’est un message fort envoyé à la société.
Comment a été perçu en Algérie votre livre, Laissées pour mortes, écrit avec deux victimes ?
Il n’était pas vendu en Algérie. Mais le seul fait qu’il existe a été ressenti comme un immense espoir par toutes ces femmes. Les médias, quant à eux, ont applaudi l’initiative. Tout comme l’opinion publique, qui s’est mobilisée pendant quelques jours. Mais très rapidement, c’est retombé. En revanche, le ministère algérien de la solidarité nous a attaquées verbalement, et nous a traitées de menteuses.
Combien de femmes ont pour l’instant été victimes de cette nouvelle vague d’agressions ?
C’est très difficile à dire car elles ont peur de témoigner, et, bien sûr, il n’existe pas de chiffres officiels. Les victimes doivent même se battre avec les policiers pour qu’ils acceptent d’enregistrer leurs plaintes ! Aujourd’hui, les violences ont peut-être déjà atteint la même ampleur qu’en 2001, peut-être l’ont-elles même dépassée.

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Déclaration d’organisations algériennes de défense des droits humains :
Hassi-Messaoud : Halte à la “fatalité” de la terreur à l’encontre des femmes !
La Constitution algérienne consacre la sécurité des citoyennes et des citoyens. L’Algérie a ratifié la Convention sur l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, la Convention contre la torture et autres peines et traitements cruels ou dégradants, la Déclaration sur l’élimination des violences faites aux femmes.
Au nom de ces principes, nous sommes profondément choqués par la nouvelle tragédie vécue par des femmes, venues de différentes régions d’Algérie, travaillant et vivant dans des habitations précaires à Hassi-Messaoud, une des villes les plus sécurisées du pays.
Le martyre qu’elles viennent de subir est la répétition macabre des évènements de 2001. Un sinistre 13 juillet 2001, une horde de 300 hommes armés attaquent une centaine de femmes et leur font subir les pires atrocités – un véritable lynchage – dans le quartier d’el-Haicha à Hassi-Messaoud.
Nous tenons d’abord à exprimer à ces nouvelles victimes notre solidarité, notre indignation et notre émotion face aux actes barbares que des criminels déchaînés commettent sans répit en venant et revenant plusieurs nuits de suite, depuis quelques semaines, sur les lieux de leurs forfaits.
Juillet 2001 … mars 2010
Même lieu.
Mêmes agressions.
Même type d’agresseurs lâches et cyniques provoquant des actes méticuleusement organisés, donc mûrement prémédités sinon commandités.
Même type de scénario d’horreur où les criminels regroupés et encagoulés terrorisent chacune des victimes parce que isolées et sans défense.
Même type de violences extrêmes où la rapine, les injures et la torture visent à humilier et à réduire à néant les femmes en tant que telles.
Même volonté par la valeur exemplaire de tels actes de terreur de dissuader toutes les femmes d’exercer librement leur droit au travail où que ce soit sur le territoire national et de les punir parce qu’elles vivent seules.
Au-delà du constat horrifié, de la condamnation des criminels et de la compassion pour les victimes, nous tenons aussi à souligner le caractère particulier de ces expéditions punitives qui rappellent étrangement non seulement les évènement de 2001 mais aussi toutes les autres agressions depuis vingt ans dans différentes régions d’Algérie ( Ouargla, Remchi, Bordj, Tebessa…). Elles rappellent étrangement, hélas, les viols collectifs des femmes par les terroristes, ce crime contre l’humanité, tâche noire qui a mis en péril notre avenir et celui de toute la société. Il s’agit donc d’une violence systématisée, construite, structurelle, orchestrée, autant d’éléments de gravité supplémentaire.
En effet, cette répétition et continuité d’actes odieux à l’encontre des femmes qui semblent se perpétuer comme une ‘fatalité’ n’est possible que parce qu’en 2001 le traitement de l’affaire de Hassi-Messaoud s’est réduit à une parodie de justice reléguant cette tragédie au rang de vulgaire fait divers.
Cette répétition et continuité d’actes intolérables n’est possible que par la complicité et le silence non seulement des institutions et des autorités locales mais aussi le laxisme de la société. D’ailleurs, l’absence de réaction citoyenne et de médiatisation de cet évènement est frappante et inquiétante.
Cette répétition et continuité de crimes contre l’humanité n’est possible que par l’impunité dont bénéficient les agresseurs contre les femmes.
Cette répétition et continuité de violation des droits de la personne humaine n’est rendue possible que par l’absence de l’Etat et des institutions censés protéger les citoyennes et les citoyens.
Est-ce que cela signifie qu’aucune femme ne peut se sentir en sécurité dans son propre pays et qu’aucun citoyen n’est protégé par la loi ?
C’est pourquoi, encore une foi, nous dénonçons avec force ces crimes et interpellons les pouvoirs publics pour qu’ils réagissent en urgence en assurant la protection de ces femmes victimes encore sous le coup de la menace quotidienne, et leur prise en charge globale (médicale psychologique, sociale et juridique). Nous sommes déterminés à soutenir toutes ces femmes victimes d’agressions inacceptables.
Signataires :
Réseau Wassila, ADPDF (Association pour la défense et protection des droits des femmes), AEF (Association pour l’émancipation des femmes), APF (Association du planning familial), ANADDE, ATUSTEP, Amusnaw, AVIFE (Association d’Aide aux Victimes de Violence Femmes et Enfants), CIDDEF (Centre d’Information et de Documentation /Droits des Femmes et des Enfants), Collectif des Femmes du Printemps Noir, Djazairouna, FEC (Femmes en Communication), Femmes PLD, LADDH Ligue Algériennne de Défense des Droits des Hommes), LADH (Ligue Algérienne des Droits des Hommes), RACHDA, SOS Femmes en Détresse, Tharwa Fatma N’Sumer, Fatiha Mamora et Rahmouna (deux femmes victimes des attaques de 2001 à Hassi Messaoud).
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LEMONDE.FR | 22.04.10 | 19h59  •  Mis à jour le 23.04.10 | 11h50
 
Algérie, le lynchage des femmes de Hassi Messaoud se poursuit, par Nadia Kaci
 
Des faits extrêmement graves ont eu lieu ces deux derniers mois dans la ville de Hassi Messaoud, base pétrolière du sud algérien où une chasse aux femmes s'est organisée. Ces dernières, venues des quatre coins du pays, travaillant dans des multinationales afin de subvenir aux besoins de leurs familles, se sont fait agresser régulièrement la nuit. Leurs maisons ont été saccagées et pillées par des hommes armés de gourdins, de haches, de couteaux, qui agissaient cagoulés, ou même à visage découvert. La plupart du temps, les femmes avaient beau hurler, aucun voisin ne leur venait en aide. Lorsqu'elles se rendaient au commissariat, elles devaient supplier des policiers méprisants pour que leurs plaintes soient enregistrées. Dans la nuit du dimanche 11 avril 2010, les agressions ont redoublé. Aucun auteur de ces crimes n'a été poursuivi en justice. Aujourd'hui, si un certain calme est revenu, les femmes subissent des pressions et intimidations en tout genre.
Ces crimes ne sont que la continuité de la tragédie du 13 juillet 2001, dont il est important de rappeler les faits : plus d'une centaine de femmes furent violées et torturées à l'appel d'un imam, par quatre cents à cinq cents hommes – l'une d'elles fut enterrée vivante ! Sur cette foule ayant commis ce pogrom, seuls vingt-neuf hommes ont été accusés. Parmi eux, seuls trois hommes ont réellement purgé leur peine. Les autres ont été condamnés par contumace, ou encore innocentés ! L'imam, lui, a été arrêté quelques heures et relâché sur injonction d'Alger !
Le Code de la famille voté en 1984 à l'Assemblée nationale algérienne est pour moi l'un des facteurs qui a rendu possible le lynchage des femmes de Hassi Messaoud. Il régit le statut personnel de la femme au sein du couple, faisant d'elle une mineure à vie, passant de la tutelle du père à celle du mari, devant obéissance à ce dernier, et pouvant être répudiée à n'importe quel moment, le mari ayant le droit de garder le logement conjugal pendant que la femme se retrouve dehors avec ses enfants. Et même si ce code a connu de légers amendements, en 2005, il reste profondément inégalitaire et criminel. En fragilisant les femmes et leurs enfants, c'est une société tout entière qu'il a fragilisée. De plus, en mettant les femmes à la disposition et sous le contrôle des hommes, ce code envoie un message fort à toute la société et aux hommes en particulier : "Si vous avez des problèmes, de mal-être, ne nous cassez pas la tête avec vos revendications, défoulez-vous sur les femmes !" Comme dit le proverbe algérien :  "Tekber ou tansa wou ttaffrha fi'n'sa",  "Tu grandiras, tu oublieras et tu le feras payer aux femmes."
Le deuxième facteur important est le travail de grande envergure des intégristes qui, pendant des années, ont imprégné tout le tissu social de leurs discours profondément haineux et misogynes, en désignant les femmes comme la cause de tous les maux de la société. Ils ont détourné les textes religieux de façon à renforcer la suprématie des hommes. Pendant les années de terrorisme triomphant, à la menace des femmes qui ne se soumettaient pas, s'est ajouté l'enlèvement de plusieurs milliers d'entre elles dans les maquis par les groupes armés intégristes. Elles y furent violées, torturées, soumises à l'esclavage. Beaucoup d'entre elles ont été assassinées ou ont disparu dans la nature. Leurs bourreaux ont très peu été inquiétés, voire pas du tout. Aujourd'hui, on les appelle des repentis sans qu'ils se soient repentis de rien et ils se meuvent dans les villes en toute impunité.
Partout en Algérie, des femmes humiliées n'arrivent pas à faire valoir leurs droits à la sécurité pourtant inscrits dans la Constitution.
Voilà comment ces dernières années les violences à l'encontre des femmes a augmenté de façon alarmante.
Si ces dernières nuits les femmes de Hassi Messaoud ont pu dormir tranquillement, je sais à quel point leur répit est fragile et temporaire : ceux qui leur en veulent d'avoir crié à l'aide savent attendre…
Aussi, j'en appelle au gouvernement algérien pour faire respecter la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, qu'il a ratifiée en 1996.
J'en appelle à la cinquantaine de multinationales qui emploient ces femmes pour les protéger au lieu de les fragiliser en les menaçant de licenciement, comme certaines l'ont été pour cause d'absence provoquée par leurs agressions.
Et si, aujourd'hui, plusieurs associations algériennes se sont mobilisées, j'appelle le peuple algérien à exprimer son désaccord sur ce qui entache son intégrité.
Hassi Messaoud n'est pas une affaire de femmes, c'est une affaire d'État. C'est aussi une affaire de droits humains. En somme, c'est notre affaire à tous !
Nadia Kaci est comédienne, coauteure de Laissées pour mortes. Le lynchage des femmes de Hassi Messaoud, Max Milo éditions.

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C o o r d i n a t i o n F r a n ç a i s e
M a r c h e M o n d i a l e d e s F e m m e s
Coordination Française Marche Mondiale des Femmes
à
Mr Jean-Michel Joubier
Responsable Secteur International de la CGT
Monsieur,
Le 13 juillet 2001, une centaine de femmes ont été sauvagement agressées, frappées,
violées et enterrées vivantes. Une expédition punitive menée par trois cents hommes, encouragés par un
imam local, sans autre raison que celle de s'attaquer à des femmes seules, venues des quatre coins du pays
pour travailler sur les sites des sociétés étrangères installées au coeur de l'Algérie, à Hassi Messaoud,
grande cité pétrolière du Sahara. A l'époque, seuls 29 hommes ont été jugés, et 3 seulement ont purgé leur
peine.
Neuf ans plus tard, ces exactions recommencent : même lieu, mêmes violences, mêmes types
d'agresseurs, même impunité. La police, les autorités sur place, ainsi que le gouvernement, nient la réalité
de ces actes inqualifiables qui visent à empêcher les femmes de travailler et à les chasser d'Hassi
Messaoud.
En Algérie, des associations et organisations se sont réunies pour réagir (voir lettre jointe).
En France, de nombreuses associations ont fait de même et pris des décisions (voir compte-rendu joint)
Entre autres, celles de s'adresser au monde du travail :
- Alerter le BIT et les organisations syndicales ;
- Rédiger des lettres aux présidents des entreprises internationales établies à Hassi-Messaoud au sujet de
la sécurité de leurs employées ;
- Défiler le 1
Je me permets donc, au nom de ce Collectif, de vous alerter sur cette situation, de vous demander si vous
en avez eu connaissance ; si vous avez ou pouvez contacter les organisations syndicales algériennes avec
lesquelles vous avez des liens pour connaître leur position et leurs actions de solidarité envers ces
travailleuses ; si vous êtes d'accord pour soutenir et relayer nos propositions de soutien en France.
En vous remerciant de votre attention
Bien cordialement
Nelly Martin - Marche Mondiale des Femmes France
er mai sous la bannière "Toutes solidaires avec les travailleuses de Hassi Messaoud".
Contacts :
marchfem@rezisti.org, 01 44 62 12 04 ; 06 80 69 95 25
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Coordination Française Marche Mondiale des Femmes, 25/27 rue des Envierges, 75020 Paris ;
Tel : 0144621204 ou 06806 9525, mail :
marchfem@rezisti.org ; site : www.mmf-France.fr
 
 
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